E… comme ÉMOTIONS

L’émotion est le graal du lecteur de romans. Celui qui ne veut pas vibrer au gré des aventures d’un héros choisira plutôt de lire un essai ou un guide de développement personnel. En tant qu’auteurs, nous cherchons donc à faire passer les émotions dans nos mots mais ils nous paraissent parfois bien dérisoires pour traduire leur intensité.

Et si je vous disais que les mots ne sont qu’un élément parmi d’autres pour provoquer une émotion, et pas forcément le plus important. Si ce n’était pas le cas, alors il suffirait d’utiliser des superlatifs et le tour serait joué.

Comment, dans ces conditions, impulser une émotion et la faire monter en intensité ?

C’est une question de machiavélisme, ni plus, ni moins. Une première technique consiste à installer une émotion qui ira crescendo tout le long du récit. Il s’agit alors de doser finement la progression.

Vous pouvez aussi opter pour un schéma basé sur les montagnes russes, et alterner les émotions en soufflant le chaud et le froid. Dans ce schéma, pensez juste à intensifier chaque montée et chaque descente.

Mon conseil pour écrire une scène où vous voulez impulser une émotion intense, c’est de démarrer par une émotion différente, voire opposée. Et si en plus, vous informez le lecteur en amont de ce qui attend le personnage, vous ajoutez le suspense et l’angoisse.

Prenons par exemple un personnage qui vient d’obtenir la promotion qu’il attendait et qui va lui permettre d’offrir à sa femme enceinte et à leur bébé à venir un meilleur logement. Vous le montrez en train d’acheter une bouteille de champagne. Pendant ce temps, sa femme a perdu son bébé. Votre lecteur le sait, mais pas votre personnage.

Cette distribution désynchronisée des informations crée les conditions idéales pour plonger votre lecteur dans l’angoisse. Il voit le personnage acheter sa bouteille de champagne, il sait qu’une terrible nouvelle l’attend, que son rêve va se briser, que rien n’aura plus d’importance, ni sa promotion, ni sa belle maison…

En conclusion, ne vous prenez pas la tête avec les mots d’émotion, restez simple et distribuez les informations au bon endroit pour faire monter la tension.

Souvenez-vous aussi que l’émotion épuise et s’épuise. Plus vous vous attardez sur elle, plus elle s’affaiblit. Dans cet esprit, inutile de mettre de l’émotion à tous les étages ; quelques moments choisis seront d’autant plus efficaces qu’ils seront mis en contraste.